Un jardin c’est une porte ouverte pour accueillir la profusion de la Nature chez soi, surtout si on aide Dame Nature en semant moultes plantes !
Mais il ne faut pas se voiler la face, l’achat de graines représente un budget qui peut nous décourager… Surtout quand il faut en renouveler régulièrement le stock pour garnir chaque année son potager.
On est aussi souvent frustré devant la difficulté à se procurer des graines de plantes indigènes, il existe bien des mélanges de graines pour pré-fleuri, mais rares sont ceux qui ne contiennent que des plantes de chez nous et il n’est pas toujours évident de trouver les graines de la plante qui nous fait de l’œil, surtout si en ne connait pas son nom !
Heureusement, la Nature est généreuse et nous offre ses semences à profusion, particulièrement en fin d’été si la place n’a pas été nettoyée par l’humain pour faire « plus propre » (quand on vous dit qu’un jardin propre est impropre à la vie…).
Mais comment récolter ces graines ? Suivez les conseils de votre coach !
Les fleurs
Elles vous séduisent avec leurs couleurs enjouées, vous font frémir avec leurs parfums délicats, vous font même vibrer lors de l’observation de leurs nombreux visiteurs… D’innombrables fleurs sillonnent votre chemin quotidien et vous mettent du baume au cœur chaque fois que vous posez les yeux dessus, c’est une bonne raison pour les accueillir dans votre jardin !
Mais comment faire pour les adopter ?
Inutile d’arracher la plante à son milieu pour l’emmener dans votre jardin !
D’une part c’est totalement irrespectueux de la Nature (et totalement interdit dans de nombreux endroits), d’autre part les risques que la plante meure des suites de ce traitement sont grands. Transplanter une plante en fleur est le pire moment pour le faire car toute l’énergie de la plante va être mise au profit de la formation de ses graines et non pas au déploiement des racines, graines qui ont peu de chance d’arriver à maturité avant que la plante ne meure… De plus, il y a de fortes chances que la plante soit une annuelle, elle ne reviendra donc pas l’année suivante…
Plutôt que de porter préjudice à l’endroit où s’épanoui la belle convoitée, repérez-le et revenez plus tard quand la floraison sera terminée pour en récolter les graines.
Règles de récolte
La récolte de graines ne se fait pas n’importe comment, il y a des règles à respecter :
Respecter le lieu de récolte :
Pour commencer, on respecte le lieu de récolte.
On ne va pas piquer les graines en rentrant sur une propriété privée (à moins d’avoir la permission du propriétaire), ni sur un site protégé (parc naturel ou autre).
On respecte aussi la plante et on n’en prélève JAMAIS l’entièreté des graines, maximum 1/3 par plante (ou sur 1 plante sur 3) pour permettre à l’espèce d’assurer sa descendance sur l’endroit de la récolte.
Récolter au bon moment :
Il faudra peut-être être patient, mais rien ne sert de récolter les graines avant qu’elles ne soient mûres, si elles ne le sont pas elles ne seront pas viables.
Les graines prêtes à la récolte sont souvent bien plus foncées et/ou brillantes que les graines immatures.
Attendez que la tige de l’inflorescence soit complètement fanée et sèche pour être sûr que les graines soient arrivées à maturité. Mais n’attendez pas de trop au risque de perdre la récolte…
Les graines arrivent logiquement après la floraison ; les graines de fleurs de printemps se récoltent donc fin du printemps et début d’été, celles d’été à la fin de celui-ci et au début de l’automne, etc.
Récolter par temps sec :
À moins qu’elles ne soient destinées à un semis direct (comme dans la nature), les graines doivent être récoltées bien sèches pour pouvoir être conservée. L’idéal étant de faire la collecte après la rosée matinale et quelques jours sans pluie… si ce n’est pas le cas, laissez-les sécher convenablement en les étalant plusieurs jours dans un local sec et aéré avant de les conditionner.
Dois-je préciser que sécher ses graines dans un four, un micro-onde ou avec un sèche-cheveux est une très mauvaise idée ?
Respecter la vie :
Même si vous ne les remarquez pas, il y a de fortes chances que votre récolte de graines contienne également de minuscules êtres vivants qui avaient élu domicile dans l’inflorescence cueillie.
Le fait d’étaler votre récolte quelques heures avant de l’ensacher permettra à ces petits coléoptères, araignées, chenilles et autres insectes involontairement capturés de s’échapper. Outre le fait de préserver la vie (à condition de les remettre dans leur habitat), cette petite opération vous évitera la mauvaise surprise de découvrir vos graines stockées dévorées par un petit gourmand qui aurait été enfermé avec…
Le mieux est de le faire dans une assiette ou sur un drap blanc (ou jaune) pour les grandes quantités, ce qui permet de mieux repérer les petits intrus au moment du tri final, et de surcroit, va inciter plusieurs squatteurs à quitter l’amas de graines attirés par la couleur claire appétissante.
Techniques de récolte
La richesse de la Nature se retrouve notamment dans la diversité des manières dont les plantes proposent leurs graines. Certaines sont logées dans des fruits charnus (bryone), d’autres bien à l’abri sous de redoutables piquots (chardons), d’autres encore sont expulsées dès qu’on en effleure la silique (alliaire) ou s’envolent à la moindre brise grâce à leur aigrette (pissenlit), certaines graines attendent que leur capsule soit renversée pour s’en écouler dans une joyeuse sonorité (saponaire), d’autres sont étalées sur un plateau (achillée) ou bien sont terriblement attachantes (les fameuses « plaque-madame »),… Bref autant dire que les graines de chaque plante nécessitent presque une technique particulière de récolte. Prenez le temps d’observer le moyen de dissémination des graines convoitées avant de vous précipiter dessus, au risque d’en perdre une grande quantité.
La tête en bas :
Le plus simple pour récolter un grand nombre de graines est d’en cueillir l’inflorescence complète et de la placer la tête en bas dans un grand sac en papier. On agite ensuite délicatement le sac en tenant fermement les tiges afin que les inflorescences n’en touchent pas le fond et que les graines y tombent (ou on le suspend et on attend que la pesanteur joue son rôle), ce qui permet de ne pas « polluer » la récolte de graines avec des résidus de la plante et aussi de mieux préserver l’inflorescence qui pourra ainsi avoir une seconde vie : nigelle de damas, ancolie, lavande, sedum, immortelle … peuvent être du plus bel effet dans un bouquet séché.
Si vous souhaitez préserver la beauté de cette Nature morte dans votre jardin, et par la même occasion préserver de nombreux gîtes naturels pour les auxiliaires (*), vous pouvez aussi simplement plier délicatement la tige de l’inflorescence pour que les graines « coulent » dans un récipient que vous aurez préalablement disposé sous la fleur. Pour ne perdre aucune graine, placez un sac en papier sur l’inflorescence à récolter avant d’en plier la tige là où elle est encore souple. Tapoter ensuite délicatement l’inflorescence pour que les graines tombent. Cette méthode demande de la délicatesse, mais de nombreux insectes et autres petits habitants du jardin vous remercieront de leur laisser ainsi des abris pour s’y loger durant la rude saison hivernale.
Cette technique convient pour toutes les plantes qui « libèrent » facilement leurs graines, comme celles qui ont des capsules (*), je vous la déconseille pour les graines contenues dans des fruits charnus.
Avec doigté :
Une autre manière de procéder à la récolte de graine sans cueillir la tige est d’égrainer l’inflorescence avec les doigts. Cette technique convient bien pour la plupart des astéracées et autres fleurs qui disposent de nombreuses graines en ombelle (*), corymbe (*) ou en grappe ainsi que pour les plantes à siliques.
Placez un contenant sous l’inflorescence et froissez-la délicatement avec vos doigts de manière à en faire tomber les graines au bon endroit. Pour les siliques, il vous suffit de froisser l’enveloppe sèche du fruit, attention, certaines sont explosives…
Vous pouvez ainsi récolter une inflorescence dont toute les graines n’ont pas atteint leur maturité et préserver celles qui doivent encore vieillir en n’égrainant que celles qui sont récoltables.
Avec un sac préventif :
Certaines graines sont encore plus convoitées par les occupants du jardin que par nous… aussi faut-il parfois préserver sa future récolte de la gloutonnerie de certains pour être sûr d’en avoir une. C’est le cas par exemple des graines de tournesol dont les oiseaux raffolent.
D’autre graines sont aussi volatiles et ne nous attendent pas spécialement avant de quitter les lieux…
Il faut donc parfois préserver la fleur pour en récolter les graines. Pour ce faire, il suffit de l’emballer délicatement avec un sac en papier avant que les graines ne soient mûres, mais après qu’elles aient été fécondées, si vous emballez la fleur trop tôt, il n’y aura pas de graines non plus.
Avec des gants :
La récolte de graines nécessite parfois que l’on prenne certaines protections… notamment les plante des genres Carduus (les chardons proprement dits), Cynara (les artichauts) et Cirsium (les cirses) ou bien encore la bardane dont les piquots peuvent nous meurtrir les mains. Une bonne paire de gants sera donc la bienvenue au moment d’ouvrir l’inflorescence épineuse (et parfois même un bon sécateur ou couteau) !
Autres conseils :
Ayez toujours dans votre sac ou votre véhicule quelques sacs en papier prêts à recevoir une collecte impromptue de graines.
Pour trier vos graines, n’hésitez pas à sortir les ustensiles de cuisine : assiette blanche pour mieux repérer les graines bien mûres du reste ; passoire ou chinois, bien pratique quand il s’agit de petites graines, pinceau à beurrer pour balayer les petites crasses …
Au moment de la récolte, placez toujours une inflorescence complète avec les graines de la plante si vous n’avez pas de quoi noter son nom sous la main. Cela évite de ne plus se souvenir de quelle plante il s’agit quand on « retrouve » le sac de récolte ou de différencier les différentes graines si la récolte a été multiple.
De même, si vous stockez vos graines, notez toujours l’espèce et la date de récolte !
Pour les semis, certaines graines de sauvageonnes nécessitent un traitement particulier pour permettre la germination des graines comme une stratification (*) à froid ou à chaud ou un brossage vif afin de remplacer l’usure naturelle ou les conditions hivernales (ou estivale) que devrait naturellement connaitre la graine. Et ce n’est pas toujours évident de savoir quelle graine nécessite quel traitement !
Pour être certains de réussir vos semis si vous n’en connaissez pas la méthode appropriée, c’est comme pour tout, on ne met pas tous ces œufs dans le même panier ! Ne misez pas sur une seule méthode/période de semis et multipliez les manières de de le faire : une partie à la volée dès leur récolte, une autre partie en pépinière au même moment, et au printemps à la volée et en pépinière.
Pour ma part, j’opte le plus souvent pour la méthode de Dame Nature, je lance les graines à peine récoltées sur les zones que je veux combler, avec l’entièreté de l’inflorescence parfois et un désherbage grossier préalable. Certes, la méthode est hasardeuse et une grande partie des graines ainsi disséminée se fera grignotée avant d’avoir eu le temps de penser à germer, mais elle a le mérite de me donner largement plus de temps pour profiter de mon jardin ! Et je garde toujours une petite réserve à semer avec plus de bichonnage au printemps si je ne vois rien poindre…
Vos plantes aromatiques sont toutes des plantes à fleurs, laissez-les fleurir pour en récolter les graines (et pour le plus grand bonheur des insectes butineurs, elles sont toutes mellifères (*) !).
Certaines plantes sont plus faciles à reproduire en passant par la multiplication végétative que via leurs graines, n’hésitez pas à vous lancer dans l’aventure du bouturage ou du marcottage !
Les légumes
Il n’y a pas que les graines de fleurs que l’on peut récolter, celles de nos légumes aussi !
Les légumes fruits font souvent l’objet d’une récolte de graines.
Après tout, quoi de plus facile que d’écarter d’un coup de couteau les graines d’une tomate ou d’un poivron lors de sa préparation en cuisine ? Les graines ainsi mises de côté peuvent aisément être nettoyées et mises à sécher tout en continuant la préparation du souper. Pour les graines gélatineuses de tomates, étalez-les simplement sur un essuie-tout que vous repliez en deux et mettez à sécher, inutile de vous fatiguer à séparer totalement la graine de l’essuie-tout qui y sera collé une fois sec, vous pouvez les semer avec puisqu’il va se décomposer.
De même pour les légumes grains, il suffit de laisser quelques gousses sécher totalement sur le pied pour ensuite en récolter les graines.
La récolte des légumes feuilles et des légumes racines est moins courante, tout simplement parce que pour pouvoir en récolter les graines il faut les laisser fleurir, et pour les laisser fleurir, il ne faut pas les récolter ou alors seulement quelques feuilles (mais certainement pas la racine !).
Bébert (*) ne verra jamais fleurir ses salades puisqu’il veut un potager propre, mais si vous ne récoltez pas tout et que vous laissez quelques légumes faire leur cycle complet et pas seulement la moitié, votre potager vous fournira lui-même ses graines !
Et oui, tous les légumes fleurissent, même si pour certains on leur en donne rarement l’occasion…
Si vous ne récoltez pas une carotte, l’année suivante elle va monter en fleurs et vous offrir des centaines de graines ! De même pour une salade, un chou ou tout autre légume issue d’une graine (logique mais pas évident pour tout le monde…) ou même d’un bulbille (ail, oignons, échalotes, …) !
Loterie génétique :
Une graine étant le résultat de la fécondation entre deux gamètes, on s’expose donc à une certaine loterie génétique en récupérant les graines de ses légumes (il en va de même pour les fleurs cultivées).
En effet, les différentes variétés que l’on cultive d’un même légume sont issues d’une même espèce peuvent se féconder entre elles ou avec l’espèce souche. Par exemple, toutes les variétés de carottes sont issues de notre carotte sauvage (Daucus carota), elles peuvent se féconder entre elles ou avec une carotte sauvage donnant ainsi des graines d’une nouvelle variété.
Cette loterie est cependant différente selon les espèces.
La fleur de plante monoïque (qui possède des fleurs mâles différentes des fleurs femelles) comme le cyclanthère et toutes les autres cucurbitacées est bien plus sujette à la fécondation croisée de deux plantes différentes qu’une fleur dioïque (organes mâles et femelles présent dans la même fleur). Ces légumes sont donc plus sujets à hybridation avec d’autres variétés de la même espèce. Rassurez-vous concernant le cyclanthère, il est le seul de son espèce, contrairement aux autres courges et courgettes qui sont sujettes à hybridation avec de nombreuses autres variétés. Pour ce genre de légumes, si vous voulez être certains de la variété des graines récoltées, il vous faudra penser à jouer vous-même le rôle de l’abeille en pollinisant vous-même la fleur femelle à peine éclose sur le bout du pistil (*) avec un pinceau qui aura été chatouiller les étamines d’une fleur mâle de la même variété, emballez ensuite la fleur pour qu’aucune abeille ne vienne la butiner et laissez-en grossir le fruit.
Au contraire, de par la forme de leurs fleurs qui préfèrent se faire féconder à l’abri des regards indiscrets, certains légumes comme les solanacées (tomates, aubergines, poivron, …) et les fabacées (pois, haricots, fèves), s’autofécondent particulièrement bien nous garantissant mieux la récolte de graines de la même variété.
Pour d’autres encore, la loterie est complètement truquée et le résultat sera totalement aléatoire même si on en cultive qu’une seule variété, il s’agit de toutes les variétés F1.
Faites toutefois attention avec les graines de courgettes et les pâtissons, ce sont des variétés de la même espèce (Cucurbita pepo) qui est également celle des coloquintes. Contrairement aux autres légumes qui n’ont pas ce risque, les graines récoltées peuvent donner des fruits impropres à la consommation. Pour le savoir il faut en goûter un morceau cru. Si celui-ci est amer, c’est qu’il est toxique…
Certains légumes se reproduisent nettement mieux par multiplication végétative de leurs tubercules, comme les pommes-de-terre ou le topinambour ; à telle point que certaines variétés ne prennent même plus la peine de fleurir.
D’autres nous réservent parfois des belles surprises comme l’ail qui développe une inflorescence remplie de bulbilles que l’on peut soit ressemer (mais il faudra patienter 3 à 4 ans avant la récolte de l’ail), soit consommer tel un « caviar d’ail » si on les récolte jeunes !
Cultivez la vie
Quoiqu’il en soit, malgré cette loterie génétique, n’hésitez pas à laisser fleurir votre potager ! Pour le faire, rien de plus simple, il suffit de ne pas tout récolter… Vous pourrez ainsi ramasser les graines de vos légumes ou les laisser se ressemer spontanément, vous aurez peut-être des déceptions mais surtout de belles surprises comme celle que j’ai eu avec un semis spontané qui m’a offert des magnifiques et délicieux choux de Bruxelles frisés !
Dans tous les cas, que les nouveaux semis soient une réussite ou non, en laissant fleurir certains légumes vous permettrez à de nombreux habitants du jardin de vivre pleinement au sein de votre potager en y garantissant un parfait équilibre.
Cerise sur le gâteau, vous obtiendrez un potager bien plus sympathique à observer, un potager qui foisonne de vie où l’on cultive la profusion de légumes mais aussi l’émerveillement, après tout, quoi de plus beau qu’une fleur d’artichaut !
Que ce soit une fleur repérée dans le jardin d’une amie, une belle sauvageonne rencontrée sur le bord de la route ou un légume que vous appréciez, n’hésitez plus à en récolter les semences pour récolter l’abondance !
Faites germer votre âme de jardinier !
Votre coach,
Harmony
PS: si vous voulez en apprendre plus sur le jardinage au naturel ou sur les différents bienfaits des plantes, n’hésitez pas à aller voir ce que je propose comme ateliers …
Toute lecture ici est très intéressante et les photos sont bien